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La légende de la nonne
(poème de Victor Hugo) Venez, vous dont l'oeil étincelle Pour entendre une histoire encor Approchez: je vous dirai celle De doña Padilla del Flor Elle était d'Alanje, où s'entassent Les collines et les halliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Il est des filles à Grenade Il en est à Séville aussi Qui, pour la moindre sérénade A l'amour demandent merci Il en est que parfois embrassent Le soir, de hardis cavaliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Ce n'est pas sur ce ton frivole Qu'il faut parler de Padilla Car jamais prunelle espagnole D'un feu plus chaste ne brilla Elle fuyait ceux qui pourchassent Les filles sous les peupliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Elle prit le voile à Tolède Au grand soupir des gens du lieu Comme si, quand on n'est pas laide On avait droit d'épouser Dieu Peu s'en fallut que ne pleurassent Les soudards et les écoliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Or, la belle à peine cloîtrée Amour en son coeur s'installa Un fier brigand de la contrée Vint alors et dit : "Me voilà!" Quelquefois les brigands surpassent En audace les chevaliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Il était laid : les traits austères La main plus rude que le gant Mais l'amour a bien des mystères Et la nonne aima le brigand On voit des biches qui remplacent Leurs beaux cerfs par des sangliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers La nonne osa, dit la chronique Au brigand par l'enfer conduit Aux pieds de Sainte Véronique Donner un rendez-vous la nuit A l'heure où les corbeaux croassent Volant dans l'ombre par milliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Or quand, dans la nef descendue La nonne appela le bandit Au lieu de la voix attendue C'est la foudre qui répondit Dieu voulu que ses coups frappassent Les amants par Satan liés Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Cette histoire de la novice Saint Ildefonse, abbé, voulut Qu'afin de préserver du vice Les vierges qui font leur salut Les prieurs la racontassent Dans tous les couvents réguliers Enfants, voici des boeufs qui passent Cachez vos rouges tabliers Texte soumis aux Droits d'Auteur - Réservé à un usage privé ou éducatif
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